« Un reportage, ça s’écrit comme un bouquin »
A l’occasion de la semaine de la presse, la classe de spécialité HGGSP de Mme De Rouck a pu assister à une conférence à l’auditorium organisée par le « CLEMI », en partenariat avec le « Press Club », représenté par Isabelle BOURDET, ainsi que le « COMITI Production » représenté par le journaliste et PDG lui-même : Tony COMITI.
Tony COMITI, cela vous parle ? Et si je vous dis Pablo Escobar… non ? Parlons-en ! Il s’agit d’un ancien photographe et correspondant de TF1. Il est à la tête de sa propre entreprise de presse « COMITI PRODUCTION ». Du côté personnel, il était photographe indépendant. De nos jours, il réalise des épisodes de « Zone Interdite », « Grand Reportage » ou encore « Envoyé Spécial ». Par ailleurs, il réalise un film pour Canal actuellement. Enfin, il fait même ses propres JT.
A propos de son entreprise, dont il est le PDG, il nous en dit quelques mots : ce sont 40 personnes qui y travaillent, avec une équipe de 4 personnes à la production, 3 à la finance, 4 archiveurs et des équipes de rédacteurs, rédacteurs en chefs, enquêteurs, caméramans, journalistes… et la liste est longue.
Le but de cette conférence était de répondre à la question : comment les journalistes arrivent-ils à rapporter l’actualité en temps de guerre ? Question qui tombe parfaitement en rapport avec ce qui se passe malheureusement entre l’Ukraine et la Russie. Tony COMITI évoque le fait qu’il y a actuellement 3-4 employés de son entreprise en Ukraine (qui y sont depuis 3-4 semaines et qui restent encore pour 3 semaines). A la base, ces journalistes étaient dans le territoire voisin de la Biélorussie. Ils se sont donc « décalés » jusqu’en Ukraine. En évoquant ce conflit, il salue l’excellente couverture médiatique des équipes de « France Télévision ». (Ce qui rappelle à Tony COMITI que lors du conflit « Iran-Irak », des journalistes étaient restés bloqués dans les hôtels et ils ont dû sortir par « la petite porte arrière » pour aller filmer ce qui se passait dans les rues).
Les journalistes produisent des NEWS, qui durent 1’’30 min et qui doivent résumer l’actualité et la géopolitique. Ils produisent aussi des documentaires, qui sont beaucoup plus longs et doivent raconter une histoire, l’histoire d’une personne. Ces journalistes peuvent avoir l’aide des « pigistes » (qui travaillent à la journée en tant que journalistes indépendants, et qui doivent fournir au soir leur reportage : ils sont caméramans et aussi monteurs).
Revenons sur les journalistes en Ukraine : ils partent au travail avec des équipements qu’on n’a pas l’habitude de prendre : gilet pare-balles, casque, trousse de survie (et des photos de sa famille). Les journalistes de « COMITI PRODUCTION » ont eux une accréditation avec l’armée. C’est grâce à cette carte de presse qu’ils prouvent qu’ils sont bien des journalistes et non pas des espions (qui se font passer comme tels). On remarque d’ailleurs qu’il y a peu (ou pas) d’images de combats, de bombardements. En tout cas, il ne faut en aucun cas que des journalistes soient armés. « On n’est pas là pour prendre position », s’exprime Tony COMITI. Il parle du mot « PRESS », que l’on trouve sur les gilets pare-balles (et avant sur les voitures). Avant ça protégeait (ça faisait même cesser le feu quand des journalistes arrivaient), maintenant plus du tout. Dans certains conflits, tuer un journaliste sert à parler du conflit en action. Donc dans certains cas, il est nécessaire d’avoir le mot « PRESS » (comme en Ukraine), et des fois non. Il évoque le fait qu’il a dit à ses équipes sur le terrain d’enlever leur casque en voiture, car ils peuvent être confondus avec des soldats. « On n’est pas là pour mourir », s’exprime-t-il.
Il raconte qu’en Biélorussie, un journaliste a été capturé en otage, et que pour protéger le travail de ses collègues journalistes (qui contenait des interviews de candidats politiques d’une élection), il a cassé la carte SD avec ses dents (pour éviter que les informations confidentielles soient divulguées). Généralement, l’équipe est composée de 2 personnes, car si 1 des 2 se fait capturer, l’autre peut prévenir la production (et les forces de l’ordre). C’est donc le fixeur qui a le rôle de filmer le reportage.
Il nous a ensuite parlé du métier de journaliste-grand reporter. En effet, ils se doivent de rester neutres, mais ce n’est pas toujours évident. Les critères requis sont de vivre l’histoire et d’essayer de la comprendre. La comprendre et restituer toutes les images que le journaliste-grand reporter voit. Il faut tout filmer pour l’histoire, pour le futur. Et c’est le diffuseur qui donne son approbation de diffusion des images filmées. Tony COMITI nous dévoile sa plus grande peur : que ses journalistes actuellement en Ukraine ne reviennent pas tous sains et saufs. Lui s’est retrouvé reporter de guerre par le hasard des choses. Il s’est retrouvé dans des conflits « comme ça ». Selon lui, les compétences nécessaires pour exercer son métier sont d’être curieux, avoir de l’expérience, pouvoir témoigner, être passionné par l’histoire et la politique. Mais tout cela s’apprend sur le terrain.
Enfin pour terminer, rappelons que Tony COMITI a été promu dans sa carrière « jeune reporter de France ».
Son mot de la fin : « Un reportage, ça s’écrit comme un bouquin : un début, un milieu, une fin ».
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